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Mémoires de l’underground stéphanois

Mémoires de l’underground stéphanois

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Notre ami Chris­tian écrit à Lin­da en 2015. Il témoigne de la vie cultu­relle under­ground sté­pha­noise et bien sûr de Radio SWK. Nous avons trou­vé ce texte sur undergroun42.canalblog.com. Mer­ci Christian ! 

Que la fête continue “Volem viure al pais”

Chère Lin­da,

En fait je n’ai connu vrai­ment la vie à Sain­té que lycéen, soit au début des années 80. En effet, avant, j’é­tais reclus dans ma cité Casi­no, riante construc­tion entre che­min de fer et auto­route dans le quar­tier de Monthieu.

Mes pre­mières décou­vertes d’a­do furent, bien sûr, les repaires des ven­deurs de disques de la place. Car, qu’on s’en sou­vienne, il y avait, alors, des dis­quaires indé­pen­dants, enga­gés musi­ca­le­ment et très à l’af­fût des nou­veau­tés, imports et autres frian­dises. LE grand dis­quaire c’é­tait Tony (paix à son âme), res­pon­sable du rayon musique dites new wave, indus­trielle, rock indé­pen­dant, bref tout ce que l’on ne trou­vait nulle part ailleurs. Dans cette petite “Dis­co­thèque” pro­prette de l’a­ve­nue de la Libé­ra­tion, l’a­mi Tony dis­pen­sait avec par­ci­mo­nie ses conseils et ses tuyaux d’im­port à une clien­tèle d’a­dos affa­mée et curieuse, il faut dire qu’à part les revues spé­cia­li­sées (Best et Rock and Folk) pas grand chose pour être dans le coup.

D’autres dis­quaires tenaient aus­si bou­tique, comme l’in­né­nar­rable Nass à Centre 2, dans un autre genre plus déglingue (Soul, Funk), son heure de gloire fut son adap­ta­tion du géné­rique des Bar­ba­pa­pa à la basse, un grand moment !! Dans un autre registre, celui des disques d’oc­cas sévis­sait “La bourse aux disques”, le ven­deur ignare pen­sait que T. Rex ou Kraft­werk étaient bien moins inté­res­sant que les Rubettes. Il y avait donc foule au fond du cou­loir pour cho­per les meilleurs occas à prix imbat­tables. Mais j’ai aus­si sou­ve­nir du maga­sin Blue Note tenu par Mal­fois, le repaire de la vraie musique punk, dis­tri­bu­teur d’im­pro­bables disques de l’in­nom­brable et confi­den­tielle pro­duc­tion punk de l’é­poque. J’y allais pas trop, les grandes crêtes et les épingles à nour­rices me fou­taient un peu la trouille mais je sais que l’en­droit a été très très important.

Mais je crois que ce qui sin­gu­la­rise un peu Sain­té à cette période du début des années 80 c’est sur­tout S.W.K. Sans doute une des meilleures radio indé­pen­dante fran­çaise, née au tout début des années 80 à l’é­clo­sion des radios libres, elle fût pour nous tous l’oa­sis musi­cal, l’in­con­tour­nable fond sonore de l’é­poque. Ani­ma­teurs impec­cables, pro­gram­ma­tion démente, et fina­le­ment très pro. Je crois qu’elle reste comme l’exemple vrai­ment réus­si de ce qu’au­rait dû être une radio vrai­ment libre. En plus des émis­sions SWK orga­ni­sait des concerts en co-pro­duc­tion, j’ai le sou­ve­nir de la venue de Vir­gin Prunes, impen­sable concert à Sain­té à cette époque. Et puis SWK c’é­tait aus­si des soi­rées ultra allu­mées dans une impro­bable boite de nuit “Le bleu Citron”, qui n’a pas assis­té à ça ne peut pas vrai­ment savoir ce qu’é­tait l’am­biance à cette époque, un mélange d’éner­gie, de cooli­tude et de secouage de coco­tier. La radio a ces­sé d’é­mettre en 1985 (je crois) et n’a jamais été rem­pla­cée (même par Dio qui sur­fait sur un seg­ment plus poli­tique et musi­ca­le­ment moins tranchante).

Quelques groupes rock du crû se pro­dui­saient alors dans les bars sté­pha­nois, pro­gram­ma­tion éphè­mère et cou­ra­geuse, car orga­ni­ser un concert alors c’é­tait toute une aven­ture. Quelques noms comme ça, Cha­cha Gui­try, Lau­rence V8, Blank SS (groupe de Laurent Lachand future réa­li­sa­teur de foot sur TF1 !!), Ich Libi­do (immense groupe avec Lio­nel Limou­sin, super pro très bien), Baby­lon Figh­ters of course (sans doute le groupe le plus cha­ris­ma­tique avec BIrd comme lea­der, un peu méga­lo mais assez bête de scène), et tant d’autres que j’oublie…

Et oui par­ce­qu’a­vant y’a­vait pas de salle rock, c’é­tait à la débrouille et à l’ar­rach, l’exemple du Hall C ou B est symp­to­ma­tique, grand han­gar de tôle dans la zone plaine Achille mais avec des concerts d’O­ber­kampf, L.K.J etc…Il fal­lût attendre l’ar­ri­vée du Mis­tral Gagnant dans les années 85 pour que tout se mette en place. Tenu à l’o­ri­gine par deux jeunes mecs, le bar devint vrai­ment impor­tant à l’ar­ri­vée de sa nou­velle pro­prié­taire Myriam dite Mimi et de la nais­sance du label Mad’s Co. Sans doute la chose la plus impor­tante dans la régé­né­ra­tion et la pro­gram­ma­tion de la musique à Sain­té dans ces années là. Enfin un endroit avec une pro­gram­ma­tion régu­lière et sur­tout avec toute la scène indé­pen­dante de l’é­poque. Citer des noms serait trop labo­rieux mais beau­coup y sont passés.

Per­so je n’y allais pas trop, non par ini­mi­tié mais parce que dans le même temps j’a­vais ouvert à la même période un endroit de nuit sous l’en­seigne du Marien­bad, donc dif­fi­cile d’être par­tout. De notre côté, nous étions plus sen­sibles à la créa­tion plas­tique, aux beaux arts, d’où la forte pré­sence d’é­tu­diants de l’é­poque. Cepen­dant nous avons accueilli vers 1987, je crois, la pre­mière édi­tion des musiques inno­va­trices crée par Bru­no Meiller. Fes­ti­val qui allait per­du­rer jus­qu’à récem­ment. Impor­tant ren­dez-vous musi­cal mon­té contre vents et marées par Bru­no, volon­tai­re­ment axé sur une pro­gram­ma­tion ultra contem­po­raine, je crois que ce fameux fes­ti­val Toto mar­que­ra à jamais les mémoires. Mais pen­dant que le Mis­tral deve­nait une scène impor­tante de la musique à Sain­té et plus, nous orga­ni­sions des soi­rées en liai­son avec nos potes des Beaux Arts et d’Ar­chi. Des soi­rées qui se vou­laient décoif­fantes et qui, pour cer­taines le furent. Soi­rée Anté­christ (notre pre­mière ren­contre avec les flics qui s’in­quié­taient de voir des mecs habillés comme le KuK­luxK­lan dans la rue), soi­rée ato­mique (notre pre­mière ren­contre avec les pom­piers qui pen­saient qu’on allait foutre le feu à la rue), soi­rée V.R.P avec le groupe les V.R.P (pre­mière ren­contre avec le pro­prio qui pen­sait qu’on avait bou­sillé le plan­cher, faut dire que 200 per­sonnes qui sautent en même temps, ça bouge !!), soi­rée camen­bert du bon­heur avec le des­si­na­teur P. Vuille­min (pre­mière ren­contre avec les ren­sei­gne­ment géné­raux, faut dire que le lous­tic était fran­che­ment pis­té et bor­der line). Bref, je crois que sans le savoir nous étions tous très com­plé­men­taires avec nos endroits de nuit. Un mot pour l’an­cêtre à tous Gérard Bri­se­barre patron du Mar­quee Café, pion­nier entre tous dans les années 70.

Dans le domaine des arts plas­tiques qui nous était plus proche, les gale­ries indé­pen­dantes fleu­ris­saient aus­si à l’ombre du musée nais­sant, Ber­nard Fra­del ou le Coco­tier ren­dez vous hype de la bonne socié­té sté­pha­noise mais que avait le mérite du cou­rage. Bien d’autres expé­riences furent menées avec RCdes­fos­sés, Napalm, Nos élans ont par­fois quelque chose de méca­nique, signe que, comme en musique, Sain­té ne res­tait pas inerte, d’ailleurs une jeune géné­ra­tion, alors, d’ar­tistes allait faire par­ler de notre ville, les Favier, Kal­fas, Laget, Dja­mel Tatah. Un mot sur Dja­mel que je ne remer­cie­rais jamais assez pour la soi­rée que nous avions orga­ni­sée au Crêt de Roch avec lui, soi­rée Raï de folie, total overcontrol !!

Mais je ne peux ter­mi­ner cette petite (longue) bafouille sans par­ler de Michel Deux. Sans doute le per­son­nage le plus impor­tant de ces années là. Pré­cur­seur avec sa revue “Volup­tiare Cogi­ta­tiones”, d’une ethé­tique exi­geante et aux textes deve­nus introu­vables, hélas. Grand agi­ta­teur musi­cal avec son groupe de musique indus­trielle Torse, se pro­dui­sant en géné­ral 15 minutes avant l’ar­ri­vée de la police. Orga­ni­sa­teur infa­ti­guable de mani­fes­ta­tions diverses, expo de mail art, soi­rée au Ham­mam, lec­ture per­for­mance (nous avions orga­ni­sé la venue de Julien Blaine, grand tim­bré devant l’é­ter­nel aux per­for­mances san­glantes). Bref un mec comme on en ren­contre peu dans sa vie. Je lui dois beau­coup, il m’a fait décou­vrir alors que j’a­vais 20 ans un monde tel­le­ment loin et mys­té­rieux, je lui dois mes pre­mières vraies lec­tures, je lui dois le cou­rage qu’il nous don­nait à tous, je lui dois une cer­taine vision de la vie. Michel Deux avait tou­jours un look pro­vo­ca­teur mais c’é­tait, je crois, pour cacher der­rière ses lunettes, ses grandes fatigues de nuits courtes et sur­tout sa grande timi­di­té et son immense géné­ro­si­té. Beau­coup de per­sonnes l’ont côtoyé et lui sont, comme moi, rede­vable de beau­coup. On peut lire, d’ailleurs, le livre écrit par son ami le plus proche (Phi­lippe Grand) qui lui est consacré.

Voi­là pour le côté sou­ve­nirs sans aucune nos­tal­gie, car, l’éner­gie ne s’est jamais tarie dans notre ville et dès le début des années 90 (voir sur ce blog), d’autres per­sonnes sont arri­vés et début 2000 aus­si, et début 2010 et 2020 sûre­ment. C’est bien pour ça qu’on aime vivre ici. Que la fête conti­nue “Volem viure al pais”.

Note de la cla­viste : T’oublies Blue Note, maga­sin de disques pion­nié de l under­ground des 80’s (ouvert en 1978) avec Laurent M, Tony qui venait de la Bou­tique du Son et Chris­tian qui venait de Faran­dole. A l’époque, il y avait aus­si L’An­ti­broge, librai­rie alter­na­tive, notre Librai­rie Paral­lèle (Paris) locale. Avec l’a­ban­don de postes par Tony et Chris­tian de Blue­Note, sont arri­vés en ren­fort Lio­nel de Ich libi­do puis, Laurent L. en sou­tien à Laurent M. etc.

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